mercredi 13 avril 2011

Fini de rigoler !

Ca y est, c'est une vérité officielle, puisque le premier ministre l'a dit devant l'Assemblée nationale : "la production de pétrole ne peut que décroître" dans les années à venir (voir ici).


J'ai l'ironie facile parce qu'il n'y a pas si longtemps, quiconque lançait pareille affirmation s'exposait (au mieux) à une franche hilarité de l'assistance... mais le sujet est sérieux. C'est la première fois en France qu'un membre du gouvernement fait ce type de déclaration, et pour le coup ça n'a fait rire personne*...


Bon, d'accord, mais qu'est-ce que ça veut dire, concrètement ? 
- Que la demande mondiale en pétrole ne baissant pas, en vertu de la bonne vieille loi économique selon laquelle "ce qui est rare est cher", la flambée du prix de l'essence que nous connaissons depuis quelques semaines n'est pas anecdotique, mais s'annonce durable - enfin jusqu'au jour où nous n'aurons plus à payer pour du pétrole... faute de pétrole. D'ailleurs le pronostic a été confirmé par un autre Monsieur qu'on ne peut pas suspecter de verser dans la galéjade : le PDG du pétrolier Total himself, pour qui " il ne fait aucun doute " que le prix du litre atteindra bientôt 2 euros.


Là, on ne rigole vraiment plus du tout : je n'aime pas jouer les Cassandre, mais pour les habitants de zone rurale hyper-dépendants à la voiture que nous sommes, c'est un futur proche un rien inquiétant qui se dessine. Car les dépenses de déplacements vont peser sur notre train de vie d'une manière de moins en moins soutenable. 


Et facteur aggravant, au-delà du pétrole, l'augmentation du prix de l'énergie est une tendance générale, qui concerne aussi l'électricité et le gaz...


Après une période de désertification, le monde rural a connu un regain démographique ces dernières années. C'est particulièrement vrai de notre coin de Lauragais, où beaucoup de familles se sont installées pour pouvoir accéder à la propriété à l'écart d'un marché de l'immobilier urbain devenu zinzin, et pour s'offrir un cadre de vie apaisé et convivial. Or cette évolution risque de connaître un sérieux coup d'arrêt : que deviendra l'attractivité de nos communes lorsque la facture énergétique mensuelle d'une famille propriétaire de sa maison s'approchera du montant d'un loyer en ville, ou d'une mensualité de remboursement de crédit immobilier ? Lorsque les kilomètres à faire en voiture rendront l'accès aux services publics de proximité (déjà de moins en moins proches), aux loisirs et à la culture de plus en plus difficile ?


Que tout ceci incite moins de gens à s'installer dans nos contrées, c'est une chose. Mais il y a aussi nous, qui y sommes déjà. Pour compenser l'impact de cette facture énergétique sur le fameux "pouvoir d'achat" de nous les "ménages", il faudra une intervention publique beaucoup plus importante à tous les niveaux, pour développer une offre de transports en commun adaptée aux spécificités de notre territoire (pas simple) et suffisamment performante pour être incitative. Ou pour développer l'emploi et les services locaux, aider les habitants à améliorer la performance énergétique de leurs logements...
Il faudra aussi de l'inventivité chez ces mêmes habitants, pour s'organiser collectivement sans tout attendre de l'Etat et des collectivités locales (dont le cadre d'intervention est lui même dans le brouillard, avec une réforme territoriale qui mériterait à elle seule une bonne dizaine de billets sur ce blog).

Faute de quoi habiter dans le coin risque de devenir moins drôle...


Sur ce, je vais me coucher. C'est pas que je sois catastrophé, mais je dois me lever plus tôt demain matin pour mettre 60 euros d'essence dans la berline.



* François Fillon est beaucoup plus drôle quand il parle du "gaz de shit" .

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